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Pourquoi les statues égyptiennes ont-elles si souvent le nez cassé ?

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    Bibliothèque de l’Institut du monde arabe, notre réponse actualisée le 05/06/2023.

    Statue égyptienne ; smallbod de Pixabay

    Quand on regarde les catalogues des statues égyptiennes ou quand on visite des expositions consacrées à l’Egypte ancienne, on s’aperçoit  qu’une grande partie des statues sont défigurées. Comment comprendre ce phénomène ? N’est-il dû qu’à la difficulté de conserver des ouvrages d’art si anciens, ou y a-t-il d’autres raisons ? Quelques explications.

    Différentes explications du nez cassé sur les statues égyptiennes

    Quelques articles

    Il y a deux raisons principales à cela : Tout d’abord, il s’agit de la partie la plus saillante du visage et très souvent de la statue en général. Il suffit que la statue tombe ou reçoive un coup maladroit pour que le nez se casse. Cela peut arriver à d’autres parties saillantes comme la barbe, l’uraeus (le cobra sur le front des pharaons symbolisant leur pouvoir), les bras, etc.

    Les égyptologues parlent également de la défiguration intentionnée : à toutes les époques de l’histoire de l’Egypte ancienne, les statues pouvaient subir des attaques derrière lesquelles  il y avait l’intention de rendre la statue méconnaissable (mutiler, effacer le nom de la personne), détruire son éventuelle action magique.
    Pourquoi les statues égyptiennes ont-elles si souvent le nez cassé ? par Malika Bauwens, Beaux Arts, 28/09/2022.
    Extrait :

    « Chez les Égyptiens de l’Antiquité, cette équation est beaucoup plus complexe », rappelle Dimitri Laboury. « Le corps, poursuit-il, est comme un vêtement où habite le bâ. Le bâ est un des éléments constitutifs de l’être humain, capable de passer du monde des vivants à l’au-delà. Au moment du trépas, le , sous la forme d’un oiseau, vient s’incarner dans la statue qui a été façonnée à son image. »

    « Why Do so Many Egyptian Statues Have Broken Noses?«  par Julia Wolkoff in Artsy.net, 08/03/2019.
    Extrait :

    “The consistency of the patterns where damage is found in sculpture suggests that it’s purposeful,” Bleiberg said, citing myriad political, religious, personal, and criminal motivations for acts of vandalism. Discerning the difference between accidental damage and deliberate vandalism came down to recognizing such patterns. A protruding nose on a three-dimensional statue is easily broken, he conceded, but the plot thickens when flat reliefs also sport smashed noses.

    « Pourquoi tant de statues antiques égyptiennes ont-elles le nez cassé? » de Jacques Deveaux, In France TV info, 21/03/2019.
    Extrait :

    Les anciens égyptiens accordaient beaucoup d’importance à la représentation d’une divinité ou d’un être humain. Ils pensaient qu’elle possédait la force de la divinité. Pour un être humain, une partie de son âme habitait sa propre statue. Et cela justifie ces campagnes de vandalisme, menées pour « désactiver la force de l’image », selon l’expression de Bleiberg.

    Un ouvrage sur les statues égyptiennes

    Les statues égyptiennes du Nouvel Empire : statues royales et divines. Tome premier par Christophe Barbotin, Éditions Khéops, 2007.
    Résumé :
    Le Nouvel Empire, qui marque l’apogée dans le domaine artistique, est la période la plus connue de l’histoire égyptienne. Ses plus grands souverains, Thoutmosis III, Aménophis III, Akhénaton et Nefertiti, Toutânkhamon ou encore Ramsès II, ainsi qu’une foule de divinités et d’animaux, sont superbement représentés
    au musée du Louvre. Ce catalogue en constitue la publication exhaustive.
    La richesse de l’iconographie, majoritairement en couleur, la reproduction et la traduction intégrales de toutes les inscriptions ainsi que les annexes rendent cet ouvrage accessible non seulement aux égyptologues, mais aussi aux chercheurs et aux amateurs d’histoire de l’art en général.

    Une vidéo

    A voir aussi : Pourquoi le Sphinx a perdu son nez ?, par Nota Bene, 22/11/2021.

    Pourquoi le Sphinx a perdu son nez ?
    Nota Bene

    Ces statues au nez cassé sujettes aux théories

    L’argument des nez cassés des statues égyptiennes a été employé par les partisans de la vision afrocentriste de l’histoire. Ces derniers affirment que le royaume d’Egypte était noir et prétendent que les égyptologues auraient brisé les nez des statues pour cacher l’origine africaine des anciens Egyptiens, une théorie réfutée par une grande partie des égyptologues.
    « Égypte : Toutânkhamon, nouvelle victime du complotisme », par Laureline Dupont, Le Point, 11/04/2019.
    Extrait :

    Selon eux, nous nions sciemment la supposée origine africaine de Toutânkhamon. Depuis plusieurs années, un discours africanocentriste s’est développé pour affirmer que le royaume d’Égypte était noir. Pour appuyer leur thèse, ceux qui la propagent assurent, par exemple, que les égyptologues blancs auraient brisé les nez des statues et des momies pour dissimuler le caractère épaté de ces derniers, preuve de l’origine africaine des Égyptiens. Ce serait notamment, affirment-ils, pour cette raison que le Sphinx fut abîmé à cet endroit stratégique… Cette théorie est évidemment farfelue, car il y avait toutes les variantes de couleurs de peau possibles chez les Égyptiens, mais elle est surtout dangereuse, car elle se répand de façon alarmante dans la communauté noire depuis plusieurs années.


    Pour aller plus loin…

    Une réalité qui ne concerne pas que les statues égyptiennes

    Ce phénomène des statues au nez cassé  n’est pas propre aux statues égyptiennes. On retrouve également ces mutilations non intentionnelles (chute, coup lors des extractions, …) et intentionnelles sur les statues antiques grecques et romaines.  
    « Statues archaïques d’Athènes«  par Henri Lechat, In: Bulletin de correspondance hellénique. Volume 14, 1890. pp. 121-154.


    Cet article avance également l’argument de la mutilation intentionnelle par superstition. On mutile la statue, son nez en l’occurrence afin d’écarter le mauvais œil. L’histoire romaine à Rome in Revue des deux mondes : recueil de la politique, de l’administration et des mœurs, par M. Ampère, 1857/11, p. 311.


    EurêkoiBibliothèque de l’Institut du monde arabe


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