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Que savons-nous des camps d’internement du sud de la France instaurés pendant la Guerre d’Espagne ?

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    Bibliothèque Sainte-Geneviève – notre réponse du 17/04/2023.

    Camp d'Argeles sur mer ravitaillement de pain pour les réfugiés espagnols
    Ravitaillement des réfugiés espagnols au camp d’Argelès-sur-Mer en 1939, photographie issue de Wikimedia Commons.

    En 1939, le gouvernement français du radical Daladier ouvre la frontière aux milliers de civils et de Républicains espagnols qui fuient la dictature du général Franco. L’exode, appelé « la Retirada », est tel que le gouvernement français est submergé par les arrivées. Les femmes, les enfants et les vieillards sont envoyés dans des centres d’hébergement à travers la France. Les hommes sont parqués dans des camps que le ministre de l’Intérieur, Albert Sarraut, qualifie lui-même de « camps de concentration ». Que savons-nous de ces camps, dont l’histoire est tombée dans l’oubli ?

    Des témoignages sur la vie dans les camps

    Dessins et photographies des camps d’internement du Sud de la France (1936-1942) d’Alexandre Sumpf, Matériaux pour l’histoire de notre temps, 2022/1-2, n°143‑144, p. 67 à 79.
    Résumé : Issus des fonds Madeleine Lamberet et Vicente Pérez Melón conservés à La contemporaine, dessins et photographies illustrent l’exil de deux républicains espagnols et leur vie en camps d’internement.

    Plages d’exil : les camps de réfugiés espagnols en France, 1939 de Jean-Claude Villegas, préface de Jorge Semprun, présentation de Pierre Vilar, « Hispanistica XX », Bibliothèque de documentation internationale contemporaine [La Découverte], 1989.

    « Les photos, originales, venues d’un fonds privé, et les dessins sont là pour illustrer le propos. Mais nous disposons aussi d’une série importante de journaux publiés par les internés entre mars et septembre 1939, qui témoigne de la place que l’auteur de Plages d’exil a voulu donner à la vie quotidienne et culturelle dans les camps. On retrouve cet intérêt dans les études originales qui forment le cœur du livre. Elles privilégient trois thèmes : les diverses formes de l’auto-organisation des internés, l’accueil des autorités et de la population françaises, mélange d’imprévoyance et d’indifférence politique, et l’attitude de l’Etat franquiste. »

    Extrait du compte-rendu de Denis Peschanski

    Des ressources récentes sur le sujet

    Camps d’étrangers : le contrôle des réfugiés venus d’Espagne, 1939-1944 de Grégory Tuban, Nouveau Monde éditions, 2018.
    Résumé : Au début de l’année 1939, la guerre d’Espagne touche à sa fin. Après la rupture du front de Catalogne, près d’un demi-million de réfugiés venus d’Espagne entrent en France par les Pyrénées-Orientales en à peine deux semaines. Ils sont officiers et soldats de l’armée républicaine, brigadistes, paysans, ouvriers, intellectuels et artistes, espagnols ou internationaux. A leur arrivée, ils sont placés dans des camps du sud de la France où ils sont identifiés et comptabilisés par les services de la Sûreté nationale. Derrière les barbelés de la plage à Argelès-sur-Mer, au camp disciplinaire « spécial » de Collioure, dans les baraques du camp du Vernet, s’entassent les réfugiés de cet exode massif que l’on appelle la Retirada. Ils sont les premiers étrangers à subir collectivement des mesures coercitives de contrôle, d’internement et d’exclusion. Ils sont les « indésirables ». Cet ouvrage analyse le rôle trop peu connu de la IIIe République et des services de police dans l’établissement et le maintien des camps, qui seront repris par le régime de Vichy. Grâce à des archives inédites, l’auteur retrace et détaille le parcours de nombre de ces réfugiés, ces « espagnols rouges » dont plus de l0000 furent déportés en Allemagne.

    Geneviève Dreyfus-Armand, Septfonds, 1939-1944. Dans l’archipel Des Camps Français de Marie-Christine Volovitch-Tavares, HistoirePolitique, 2021, consultable sur la plateforme OpenEditions Journals.
    Extrait :

    « Septfonds est d’abord un camp de regroupement et de détention pour des combattants de la guerre d’Espagne. Puis à l’approche de la guerre (déclarée le 3 septembre 1939), le camp devient une réserve pour des recrutements de travailleurs étrangers et parallèlement d’engagements dans l’armée française. Le camp accueille aussi, brièvement, des combattants de l’armée polonaise défaite en septembre 1939. Enfin, à partir de fin 1940, avec l’occupation nazie, commencent des déportations de Républicains espagnols vers le camp de concentration de Mauthausen, tandis que, en 1942, Septfonds devient une étape de la déportation de juifs vers Auschwitz. »

    La Cimade et l’accueil des réfugiés: identités, répertoires d’actions et politiques de l’asile, 1939-1994 de Dzovinar Kévonian et Geneviève Dreyfus-Armand, Presses universitaires de Paris Nanterre, 2013.
    Résumé : Cette première plongée dans les archives interroge l’identité de la Cimade et son évolution, entre engagement, ancrage au sein du protestantisme, rapport au politique et intervention dans le champ public. Elle permet aussi d’investir les questionnements actuels sur le monde associatif militant et sur la politique de l’asile, des années fondatrices de la Seconde Guerre mondiale à la « crise de l’asile » de la décennie 1990.

    Les camps de réfugiés espagnols en France : 1939-1945, sous la coordination de Christian Camps et Nathalie Sagnes Alem, Editions du Mont, 2019.
    Résumé : La commémoration des 80 ans de la Retirada a été l’occasion de faire le point sur cet événement tragique qui a marqué l’Histoire mais aussi d’apporter un éclairage nouveau sur la question. C’est ce qu’ont fait les 26 auteurs anglais, espagnols et français qui ont participé à cet ouvrage.

    La France des camps : l’internement, 1938-1946 de Denis Peschanski, éd. Gallimard, 2002. Le chapitre 2 de la première partie, intitulé « Exode et exil espagnols » traite le sujet de l’internement de réfugiés espagnols dans des camps.

    Des podcasts à écouter

    Retirada, les républicains sur les routes de l’exil avec Geneviève Dreyfus-Armand et Maëlle Maugendre, épisode 3/4 du podcast « Vivre en temps de guerre, une histoire », France Culture, 22/10/2022.
    À propos : « En 1939, les républicains espagnols prennent la route de l’exode. Ils fuient la dictature franquiste et se dirigent vers la France où ils espèrent trouver refuge et soutien. La réalité est tout autre. Après l’épreuve de la Retirada, ils sont parqués dans des camps d’internement inhumains. »

    Du Camp de Gurs à Auschwitz d’Elisabeth Marimbordes, Editions Locomotive, 2023.
    À propos : « Le Camp de Gurs de A à Z. Que s’est-il passé au Camp de Gurs ? Qui le construit ? Qui est interné ? Qui part à Auschwitz ? Le premier podcast sur le Camp de Gurs pour apporter des repères historiques et littéraires. […] Je vous invite à un récit authentique avec différents invités qui vont témoigner de leur expérience du Camp de Gurs. Parce qu’il est urgent de répondre à la montée des extrémismes, du nationalisme, à la prolifération des fakes news, et aux incohérences de la cancel culture. »

    Pour aller plus loin

    Le site du Musée de l’histoire de l’immigration contient d’intéressantes ressources sur le sujet.
    Dossier thématique : La Retirada ou l’exil républicain espagnol d’après guerre de Cindy Coignard et Maëlle Maugendre, Association Adelante, janvier 2012.
    Conférence : 70 ans après, histoire et mémoire de la Retirada et de l’exil espagnol de Geneviève Dreyfus-Armand, animée par Aline Angoustures.
    Archives orales : Entretien avec Léontine Arenas : des Espagnols dans la Résistance réalisé le 18 juin 2009 à Libourne.

    Le site du Mémorial du camp d’Argelès-sur-Mer propose documents d’époque, témoignages et dossiers thématiques en lien avec « la Retirada ».

    Le film d’animation Josep (2020), réalisé par le dessinateur Aurel, retrace la vie de Josep Bartolí, interné dans plusieurs camps du sud de la France en 1939.

    Josep, première réalisation au cinéma du dessinateur de presse Aurel, retrace l’histoire vraie de l’artiste catalan et combattant républicain Josep Bartolí (1910-1995). Il a dû fuir l’Espagne à l’hiver 1939 en abandonnant sa femme pour échapper à la répression franquiste. De l’autre côté des Pyrénées, l’attend la cruelle réalité de l’un des camps de concentration du Roussillon français, où furent détenus, comme lui, des dizaines de milliers de réfugiés espagnols. De cette expérience, Josep Bartolí a livré un témoignage exceptionnel : ses dessins. Insérées à même la trame du récit dans une élégante mise en abîme avec le graphisme sensible d’Aurel, les grinçantes caricatures du héros dénoncent toutes les formes de l’oppression. Ses dessins lui valent une amitié profonde avec un gendarme du camp (narrateur de l’histoire) qui lui sauve certainement la vie. Le dessin devient le vecteur de sa résilience : les séquences oniriques de son exil américain, placé sous le signe de l’art et de son amitié avec la peintre mexicaine Frida Kahlo.

    « Josep, Une vie secrète : la répression franquiste à la première personne » d’Eve Fourmont Giustiniani (chronique cinéma), Carto, n°54, 2021, pp.8.

    Le documentaire Les camps du silence par Bertrand Mangiante (1988) réunit des témoignages d’anciens internés.
    Résumé : De 1942 à 1943, les camps du midi de la France deviennent l’antichambre des camps d’extermination nazis. Entre-temps, ils auront servi à tout : internement d’indésirables français et étrangers, des suspects politiques, des juifs.


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